Orchestre Symphonique de Bretagne, dir. Darrell Ang.
Création le 7mai 2013 au Théâtre National de Bretagne 

Score/partition : http://www.artchipel.net/fr/produit/en-resonance/

Benoït Menut - "En Résonance", pour orchestre symphonique

Le Libera me pour chœur mixte fut écrit en 2006 à la demande du chef de chœur Lionel Sow, dédicataire de l’œuvre. Quelques années auparavant, j’avais été profondément touché par les merveilleux Sonnets de la Gélodacrye du méconnu  Jacques Grévin. Ce médecin poète, ami de Ronsard s’est ensuite éloigné de lui en affichant ses convictions protestantes et dut quitter le France pour l’Angleterre puis la cour de Savoie où il devint médecin de la fille de François Ier.
 Ayant trouvé chez Grévin une écriture certes proche du style de la Pléiade mais aussi marquée par des accents religieux tout à fait singuliers (comme dans le sonnet « Délivre-moi, Seigneur, de cette mer profonde où je vogue incertain »), j’ai voulu, sur ce texte profane à consonances sacrées écrire une œuvre dans laquelle l’incipit grégorien Libera me domine de morte aeterna entrerai en « résonance naturelle » avec lui sur les plans musical, littéraire et dramatique. 
Sans renier, loin de là des éléments de langage personnels, j’ai essayé dans ce Libera me de me plonger dans l’atmosphère si singulière des œuvres de certains musiciens français de la renaissance (comme Paschal de l’Estocart et ses splendides Octonaires de la vanité du monde) et d’orienter plus particulièrement mon travail autour d’un  « contrepoint enluminant le texte ».

Score/partition : http://symetrie.com/fr/titres/libera-me

TEXTE :
Délivre-moi, Seigneur, de cette mer profonde
Où je vogue incertain, tire-moi dans ton port :
Environne mon coeur de ton rempart plus fort,
Et viens me défendant des soldats de ce monde :

Envoie-moi ton esprit pour y faire la ronde,
Afin qu'en pleine nuit on ne me fasse tort
Autrement, Seigneur Dieu, je vois, je vois la mort
Qui me tire vaincu sur l'oubli de son onde.

Les soldats ennemis qui me donnent l'assaut,
Et qui de mon rempart sont montés au plus haut,
Ce sont les arguments de mon insuffisance :

La cause du débat, c'est que trop follement
J'ai voulu compasser en mon entendement
Ton être, ta grandeur, et ta toute-puissance

Libera Me, pour choeur mixte, Benoît Menut, ensemble de solistes, direction Lionel Sow

Interprètes : Ensemble Accroche Note
Françoise Kubler, soprano
Armand Angster, clarinette
Carine Zarifian, piano

Présentation
Cette pièce est la résultante de deux chocs artistiques et symboliques. Tout d’abord, la découverte de la Septième Sonate pour piano opus 64 de Alexander Scriabine, sous-titrée White Mass, dont Le monologue d’Anna  tire sa substance harmonique et, dans une moindre mesure, mélodique. Les trois premières mesures de cette Sonate hantent donc ce monologue comme une arche de mémoire structurante. 
Ensuite, la découverte du texte de Dominique Lambert ; synthèse admirable des mythes féminins, ode à la Femme dans sa globalité physique et symbolique. Il m’a aussi hanté par son caractère lyrique et en même temps psalmodique. 
Cette pièce regorge de symboles ternaires en hommage au caractère indivisible de ce nombre (d’ailleurs, Anna peut aussi s’écrire Ana, alors équilibre et palindrome). Par un de ces « heureux hasards » qui imprime un demi-sourire sur le visage, j’en ai trouvé de similaires dans la White Mass ; en toute humilité.   
Benoît Menut

TEXTE 

Le Monologue d’Anna 



La scène est au sommet d’une colline où se voient les quatre axes du monde. Le soleil se couche.

ANNA

Je suis Anna la Mère, l’eau et l’utérus, 
je suis Anna l’Epouse, la chair et la fente, 
je suis Anna la Fille, le regard et l’hymen, et je suis la maîtresse, le réceptacle orné,
je suis la louve aux douze jours enfantant, je suis la femme fleur, qui trompe et qui trahit, 
celle qui rythme, et mêle le onze au douze, 
je suis celle qui attend au fond de la caverne, je suis le grand marais, la chair régénérée, je suis le cycle et cercle, qui recycle et relance, trou béant, abîme odorant, 
je suis l’œil très bovin, la mamelle et le lait, 
et je suis les six lèvres, le muscle distendu, la muqueuse qui s’offre et referme le monde,
déesse aux yeux de chouette, louve aux seins d’acier, je suis l’hystérique, la jument blanche offrant son vagin aux rois, 
je lave et je l’irrigue, le pays sur ma peau, 
je suis l’humus humide, je suis la mutilée, l’écorchée, la violée, 
je suis la feuille au vent, et je suis l’origine, 
je suis la biche au bois, la reine hiératique, je suis la mère-truie, la femme du verger et la fille en fleur, la princesse engloutie, l’île de l’océan, le lagon des menstrues, et l’abysse organique, montagne acérée…
je suis Anna, Anna mère des tribus, la triade guerrière et le visage hostile, la chair devenant fer, le muscle sous le sexe, celle qui fait pleurer, celle qui fait jouir, celle qui t’a blessé, 
je suis carte des terres, haute topographie, 
et le vagin denté où sommeille le monstre,
je suis le O très rouge,
je suis Anna la tour, le clitoris régnant sur la vallée fertile,
et votre mère à tous, dure vierge farouche, le regard gris et vert, réflecteurs d’océans, et de mers tourmentées, ou de plus pures lagunes,
je suis le sol gemmé, d’humus en émeraude, 
je suis la nuit qui veille, arme les cauchemars, vrille tes souvenirs, déforme tes désirs, et aspire ton âme, 
je suis la grande porte,
je suis Anna la Vieille, ridée comme ta terre, ridée comme la pomme au sortir de l’hiver, ridée comme un scrotum, à l’éveil durcissant,
je suis Anna libératrice, de fluide de tout homme, d’océans d’amnios et de lumières,
je suis l’aïeule et l’embryon, recroquevillé en ses chants et ses sangs,
et je suis la gardienne,
je suis l’os que tu sens, le tendon délicat, le tambour de la peau, le regard psychopompe, 
je suis Anna la fille
je suis Anna l’Epouse, 
je suis Anna la Mère.

Dominique LAMBERT


Le Monologue D'Anna, pour soprano, clarinette (aussi basse) et piano, texte de Dominique Lambert

Commande de la Scala de Paris, pièce pour piano solo, créée par le pianiste David Kadouch le 11 octobre 2019.

Valse Retrouvée

Écrite pour Jean Ferrandis, cette pièce pour flûte traversière solo se compose de trois mouvements :
1. Les Sons des Mâts (Sounds of masts)
2. Brise, à la surface de l'eau (Breeze, on the water)
3. Le coucou sans son nid (The cukoo whitout her nest)

Benoît Menut - L'Ombre du Vent, pour flûte solo, par Jean Ferrandis

Le Sel de la Terre, pour alto et violoncelle, commande de Sylvain Durantel, créé à Deauville le 23 octobre 2015 (Théâtre du Casino Barrière) Sylvain Durantel, alto, Emmanuel Christien, piano. Dans le cadre du spectacle « La cuisine à l’alto » enregistré, label Polymnie (POL 301 121)

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