L’IMAGINAIRE FOISONNANT DE ROBERT   

Le poète de cette semaine, Robert DESNOS, me donne des palpitations… Pour le présenter, je laisse la parole à Paul Éluard, qui écrit en octobre 1945 : 

« Jusqu'à̀ la mort, Desnos a lutté. Tout au long de ses poèmes, l'idée de liberté court comme un feu terrible, le mot de liberté claque comme un drapeau parmi les images les plus neuves, les plus violentes aussi. 

La poésie de Desnos, c'est la poésie du courage. Il a toutes les audaces possibles de pensée et d'expression. Il va vers l'amour, vers la vie, vers la mort sans jamais douter. Il parle, il chante très haut, sans embarras. 

Il est le fils prodigue d'un peuple soumis à la prudence, à l'économie, à la patience, mais qui a quand même toujours étonné le monde par ses colères brusques, sa volonté d'affranchissement et ses envolées imprévues. » 

Robert DESNOS a eu une trajectoire fulgurante et tragique à la fois… Il reste ses textes fabuleux – et notamment les deux poèmes que je lis dans l’épisode de cette semaine. J’ai choisi de vous plonger dans ses envolées majestueuses, où l’amour se déploie dans la liberté, dans une langue audacieuse, dans une énergie tellement vivante qu’elle vous requinque immédiatement.

Avec cet épisode numéro 15, je vous offre donc une expérience brûlante et passionnée...

Fermez les yeux...
...Laissez glisser en vous ces quelques phrases poétiques....

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Création graphique : Adèle LAPARRA

 PHOTO d’Henri CARTIER-BRESSON, « L'homme au parapluie devant la Tour Eiffel », 1938

EP15. Robert Desnos

LA VOIX INDESTRUCTIBLE D’ANNA  

La poétesse de cette semaine aurait le cœur brisé par les gros titres de nos journaux. Née à Odessa, elle a vécu entre St Petersburg et Moscou… Sans aucun doute, entre ses racines ukrainiennes et son amour de la langue russe, Anna AKHMATOVA serait déchirée par cette guerre fratricide.

Oui, mais la grande Anna était aussi une femme d’engagement, dénonçant le pouvoir et ses abus – notamment les crimes commis sous l’ère Stalinienne. Conséquence de cela : pendant plus de trente ans, ses écrits ont été censurés. 

Trente ans. Une très longue, très douloureuse, traversée du désert. Elle aurait pu arrêter d’écrire. Elle aurait pu mourir des persécutions, comme d’autres intellectuels de sa génération. Mais non : elle a résisté. 

Anna AKHMATOVA a poursuivi son œuvre, une œuvre d’une si grande modernité par le ton, le regard, le choix des mots. Elle y parle d’amour, de courage, de peur, de la difficulté de tenir, des ombres et de la lumière. Elle qui connaît si bien le chagrin, elle connaît encore mieux la nécessité de se relever jour après jour. 

Alors, justement à cause des nouvelles qui inondent nos écrans, il est précieux de (re)-découvrir maintenant cette immense poétesse.

Avec cet épisode numéro 16, je vous offre une expérience de modernité et d’espoir, une expérience d’amour et de liberté.

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 PHOTO de MAN RAY, « Lee Miller à Juan les Pins », 1930

EP16. Anna Akhmatova

LA POESIE ENRACINEE DE MAHMOUD  

Peut-on écrire de la poésie pour s’opposer à la brutalité qui marque les corps et les consciences ?

Peut-on répondre au chagrin de l'exil par la poésie ?

Quand on a trop mal, peut-on trouver une consolation dans la poésie ? 

Peut-on réconforter les esprits découragés via la poésie ?

Avec élan, le poète de cette semaine dit oui à ces questions. Né en 1941 en Galilée, Mahmoud DARWICH investit tout son être, son histoire, ses convictions dans la poésie : il en fait un territoire de paix, de fraternité et de sagesse.

A travers ses textes, il nous permet de prendre du recul, sécher nos larmes, remettre un pas confiant sur le chemin de notre destinée individuelle et collective.

Pour de multiples raisons, parce que je l’ai lu à des moments compliqués de ma propre trajectoire, j'ai un attachement profond à son œuvre. Et je suis sûre que les 3 poèmes que je vous donne à entendre dans cet épisode sauront toucher votre cœur…

Avec cet épisode numéro 17, je vous offre donc une expérience d’apaisement et de lumière, avec des mots qui ont traversé la Méditerranée pour atteindre vos oreilles.

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 Photo de Kepika Thapa 

EP17. Mahmoud DARWICH

TROIS VOIX ACTUELLES POUR EFFLEURER L’ÉPHÉMÈRE  

« Ah bon ? Il y a encore des gens, aujourd'hui, qui écrivent de la poésie ? »

J'ai appris à rire de ce genre de réactions. J'ai bien compris que la poésie, avec son désir d'amour, d'infini et de beauté, semblait complètement exotique, à première vue, dans notre société matérialiste et pressée. Mieux vaut choisir l'humour et la passion pour parler art poétique. Et, qui sait, peut-être des nouveaux fans se révèleront en chemin…

Les éditions Bruno Doucey ont à cœur de faire connaître les voix actuelles, françaises ou étrangères, qui ont choisi la poésie comme terrain de jeu, d'expression, de transmission. Il y a une richesse réjouissante dans les livres que cette jolie maison publie.

En 2022, le Printemps des Poètes épouse la thématique de l’éphémère. A cette occasion, justement, les éditions Bruno Doucey consacrent une anthologie à ce sujet. En introduction de l’ouvrage, on peut lire que l’éphémère est « une invitation à vivre pleinement le peu de temps qui nous est donné », à « questionner ici et maintenant la part la plus fragile, la plus secrète, la plus inouïe de nos existences ». 

Pour cet épisode 18, j’ai donc décidé de vous lire 3 poèmes, de 3 plumes contemporaines, qui sont tirés de cet ouvrage : écoutez les mots éphémères et magiques d’Albane GELLÉ, Christian VIGUIÉ et Stéphane JURANICS. 

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 Photo : Elliot ERWITT, agence Magnum Photos, « California », 1956 

EP18. Trois voix actuelles

LA POESIE ENVOUTANTE DE LOUISE

Je suis arrivée à Marseille quand l'été débutait, en mai 2020. Comme le soleil brillait sur le Vieux-Port, j'ai eu envie de manger une glace. Très vite, j'ai découvert les meilleures adresses - manière d'apprivoiser la ville par mes papilles... C'est devenu un plaisir solaire, sans culpabilité aucune, de visiter chaque semaine, entre avril et octobre, mes glaciers favoris. Le défi est de tester au moins un nouveau parfum à chaque fois. Moi qui jadis raffolais de crèmes glacées chocolat, j'ai appris à fondre pour une boule lavande, un sorbet myrtille, une saveur sésame noir... Apprécier la variété et la surprise, créer des accords voluptueux, entre du sucré et du plus acide, entre couleurs pastel et teintes vives.

Je crois que ma manière de lire la poésie ressemble à ma manière de déguster des glaces. Cela me plait de prendre des risques. Aller à la rencontre de l’inconnu. Embrasser des façons neuves d’évoquer le monde. J'aime les textes qui explorent les nuances, qui obligent à se poser des questions, qui poussent à épouser des points de vue insolites.

En découvrant la poésie de Louise GLUCK, prix Nobel de littérature en 2020, j'ai eu ma dose d'étonnement... Dans ses fragments, qui racontent souvent des tranches de vie, il est difficile d'identifier qui parle. L'imaginaire peut alors partir dans les plus folles hypothèses. On est convié à enfiler les baskets de personnages curieux, et ressentir une large palette d'émotions... Une poésie complètement captivante.

Dans cet épisode 19, je vous fais découvrir deux poèmes, qui n'ont absolument aucun rapport, deux invitations à sortir de notre façon habituelle d'appréhender la poésie... 

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 Photo : “Children run in the wheat field” © Emin OZMEN / Magnum Photos, 2017

EP19. Louise Glück

Dans un port, opère toujours le charme des bateaux. L’imaginaire se réveille en regardant coques et voiles : s’aventurer loin en mer, se confronter à l’immensité bleue, la puissance du vent, l’ombre des tempêtes. On pourrait oublier, arpentant une rade paisible, que dans un passé pas si lointain, on a capturé des êtres humains, on les a forcés à monter sur de gros navires, on leur a imposé un voyage interminable dans des conditions sordides, pour arriver vers des destinations funestes. 

En France, depuis 2006, le 10 mai est la "journée nationale de commémoration des mémoires de la traite, de l'esclavage et de leur abolition". J’ai voulu que cet épisode s’inscrive dans ce moment de réflexion collective car les poètes savent aborder de façon sensible tous les sujets – et leurs textes élèvent nos consciences. Faire ainsi connaître une poésie ardente, territoire de vérité et de profondeur.

Cette semaine, je vous donne donc à entendre deux voix incandescentes. D’abord, le poète haïtien René DEPESTRE, né en 1926, ensuite la poétesse Marie-Christine GORDIEN, née en 1965, d’une mère ardéchoise et d’un père guadeloupéen. Deux hymnes magnifiques pour se souvenir, pour rendre hommage, pour appeler à une véritable fraternité.

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 Photo : “Mine d'or de Serra Pelada” © Sebastião SALGADO / Magnum Photos, 1986

EP20. Poésie de la Mémoire

Le rapport au sacré est une question intime. Certaines personnes le vivent dans la solitude, d’autres dans des rites collectifs, d’autres encore en font l’expérience dans le contact avec l’art ou avec la nature. Les poètes nous offrent les mots de leurs vécus avec l’infini, de leurs rencontres avec la transcendance. 

J’aime particulièrement l’approche de Zéno BIANU – lui qui a tant voyagé en Asie, à la découverte d’autres façons d’aborder le vide et le plein. Lui qui est d’abord un musicien, avec une passion illimitée pour le jazz, territoire d’improvisation, de rythme, et de cuivres chaleureux. Il n’y a aucun dogme formulé dans les textes de Zéno BIANU, aucune croyance qu’il chercherait à imposer. Il se contente de raconter l’espace qui surgit du silence. Il chante l’Amour avec un grand A, cet amour force de vie, cet amour qui se faufile, qui ouvre le regard, qui tambourine en tout lieu, en tout cœur. Il nous encourage : oser l’exploration, la respiration, la contemplation. 

Toujours le lire me fait du bien : la lumière qu’il évoque me remplit et m’émerveille. J’en ressors plus apaisée et plus confiante. J’espère que ses poèmes seront une caresse pour votre âme également.

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 Photo : “Olympic Silhouettes” © Paolo PELLEGRIN / Magnum Photos, 2008

EP21. Zéno Bianu

L'éditrice me fixe, amusée, et assène la sentence : écrire un roman, ce n'est pas un exercice intellectuel. Elle n'ajoute rien. Elle n'explique rien. Je mets des semaines à décrypter l’énigme du sphinx. Jusqu’au déclic lumineux. Écrire répond à un besoin vital, un élan venu du fond des tripes. Certes, il faut utiliser sa tête pour construire l'histoire, structurer les chapitres, veiller au rythme du récit... Mais l'écriture est d'abord un mouvement organique.

Je crois que cela est encore plus vrai avec la poésie. À chaque phrase, la poésie convie les cinq sens, appelle le corps à ressentir pleinement ce qui le bouscule, le bouleverse, le chatouille, le réjouit. Forcément, dans ce tableau, le plaisir a sa place. Et c'est délicieux de lire l’évocation du désir, les mots de ces sensations qui nous rendent tellement vivants.

Ainsi pour cet épisode, direction l'île Maurice pour découvrir la poésie charnelle d'Ananda DEVI. Née en 1957, de parents d’origine indienne, cette poétesse est élevée au contact de plusieurs langues et cultures. Ethnologue de formation, traductrice de métier, elle est sensible à l’imbrication des identités, à la question de l’altérité et à la situation des femmes dans le monde. On peut lire plusieurs de ses recueils poétiques aux éditions Bruno Doucey. Vous allez voir, dans les extraits que j’ai choisi pour cet épisode, il y a un crescendo vers l’exquise incandescence.

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 Photo issue de la série “Sicilia” © Ferdinando SCIANNA / Magnum Photos, 1987

EP22. Ananda Devi

La Grèce, sa mer au bleu radieux, ses îles aux maisons blanches… Des paysages de carte postale qui font rêver alors que les vacances arrivent… Savez-vous que la patrie hellénique est aussi la terre natale d’un des plus grands poètes du XXème siècle ? Je pense à Yannis RITSOS, que j’ai découvert à travers Mahmoud Darwich (poète au cœur de l’épisode 17).

Cette semaine, je vous propose de découvrir des poèmes qui datent de 1985. Yannis Ritsos est alors à Athènes, il réfléchit à son parcours, à la nature humaine et produit des dizaines de textes courts qui ont une dimension philosophique (à retrouver aux Éditions Bruno Doucey, dans le recueil bilingue, « Balcon », publié en 2017).

Je vais vous en lire 6 : comme des petits cailloux qui tracent un cheminement existentiel, à méditer, à rêver, à ressentir tranquillement cet été…. Parfait pour terminer en beauté cette saison 2 !

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 Photo : “The Seventh Wave // Freshwater Beach” © Trent PARKE / Magnum Photos, 2000

La poésie rebelle de Yannis Ritsos


Pour démarrer la saison 3, je vous emmène sur une terre où les femmes sont damnées :

l’Afghanistan. Je vous invite à découvrir une poésie absolument magnifique, qui fait valdinguer tant de préjugés. Même étouffées, violentées, interdites d’étudier, de travailler, de se soigner, des femmes tiennent debout, mettent en vers leur quotidien, leur désespoir, leur colère.

Agissant ainsi, elles défient leurs oppresseurs et s’inventent un espace de liberté.

Je dois avouer que ce fut très difficile de faire la sélection des poèmes. A chaque page, j’avais l’impression de recevoir un coup de poignard – du fait de l’intensité du propos et de la splendeur stupéfiante des mots de ces femmes. Quelle maitrise de l’art poétique ! Elles sont les dignes héritières de leurs ancêtres persans qui faisaient de la poésie leur alpha et leur oméga. C’est donc avec émotion &amp; admiration que je vais partager mes choix – en vous encourageant vivement à acquérir le recueil pour lire toutes les autres autrices.

Tous les poèmes que je vais lire appartiennent au recueil «Le cri des femmes afghanes », publié au printemps 2022 aux éditions Bruno Doucey. Cette anthologie a été établie grâce au fantastique travail de collecte et de traduction de Leili ANVAR, qui enseigne la littérature persane à l’INALCO.  


Fermez les yeux...
...Écoutez cette poésie bouleversante, née du désir intact, vivant, des femmes d’Afghanistan.

“La poésie ne s’enseigne pas, elle s’écoute, se vit et s’en va”. 
 

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Accompagnement podcast : Collectif Pousse - Caroline Franquet &amp; Clémentine Roux

 Photo : Une jeune fille au milieu de femmes afghanes, 2017 - Parwiz / Reuters  

La poésie rebelle de Yannis Ritsos

Mathilde Vermer

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